1983 - St Savin - L’Ile d’Elle

Publié le 5 janvier 2007, mise à jour le 18 février 2008
par Yann Platon
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Première grande randonnée, à quatre.

Il est neuf heures moins le quart, c’est l’heure du départ vers l’inconnu.

Je me suis fait un peu attendre, en revanche, VERONIQUE était ponctuelle.

Tous les quatre nous prenons la direction de ST SAVIN.

C’est la foire, ou plutôt le marché : les commerçants s’installent, les rues s’animent.

Très vite, ST SAVIN s’efface derrière nous. Nous suivons la voie romaine que nous avons rejointe à la sortie de la ville et qui doit nous accueillir une bonne partie de cette première étape.

Vers dix heures trente, premier arrêt : les cavaliers se soulagent, les chevaux aussi. On en profite pour faire quelques photos malgré le soleil qui s’obstine à rester cloîtré derrière des nuages tenaces.

Avec les premières photos, la première halte, vient le premier changement d’itinéraire : la voie romaine disparait dans un épais buisson impénétrable. Le détour ne sera pas trop long, cent ou deux cents mètres tout au plus.

Nous commençons à avoir faim, mais quoi de plus naturel, à midi et demie ?

On recherche donc un lieu propice à nos ébats gastronomiques.

On attache alors nos chevaux, on les desselle et on les nourrit avant de penser à nous. Cette fois ci, pas de problème, on mange les sandwiches préparés chez nous.

A peine fini de manger, il faut déjà penser à resseller. Un petit coup de brosse, puis tout le harnachement retrouve sa place. Un dernier coup d’oeil aux pieds des chevaux et on repart : il est quatorze heures et l’étape est loin d’être finie : il reste encore vingt cinq à trente kilomètres.

Nous pouvons admirer en fin d’après midi un magnifique château plus ou moins fort du 15 ème, voire 16 ème siècle.

Puis en fin de journée, nous nous attaquons à la "forêt de VERRIERES" ...

Qu’est ce qu’il est beau le chemin ! On le prend à pieds, le pas plus tellement alerte, NEOS s’arrêtant toutes les secondes pour manger, moi criant tout ce que je peux contre les taons.

Pour couronner le tout, on se retrouve devant un grillage de deux mètres de haut.

Une seule solution : demi-tour !

Et puis non, ce serait trop long, on va couper à travers bois.

Et l’aventure commence.

Après avoir franchi une jungle de fougères entrecoupée de bosquets de ronces et trois fossés, on rattrape le chemin tant recherché.

Enfin on sort de la forêt et c’est pour apercevoir une piste d’entraînement pour chevaux. Ne nous laissons pas impressionner.

C’est dans la joie et l’allégresse que nous apprenons que notre demande d’hébergement est acceptée, au lieu-dit "BOIS GENETS".

Malheureusement il nous sera impossible d’obtenir la permission de coucher dehors, ni même dans la paille, nous devrons nous contenter d’un lit à deux places avec des draps qui sentent bon.

Quant à manger dans notre coin, il ne faut pas y compter : nous devrons nous joindre à toute la famille : NADINE, FRANCIS, FABRICE et maman.

Il est bien entendu que nous ne devions pas nous attendre à festoyer : du canard, des patates (pomme frites précise VERONIQUE), des haricots verts, du fromage, produit maison.

Quelle nuit ! Les dindons et toute la basse cour ont fêté notre arrivée, MATHILDE, la petite dernière, âgée de quinze jours, a tenu à manifester sa joie lorsqu’elle apprît notre visite.

Le lit était très moelleux, et chaud, très chaud.

Le réveil semble dur. A six heures trente, je me décide à aller nourrir les chevaux. Le brouillard est dense, l’air est frais, les chevaux sont absents. Mais après avoir sifflé, pas trop fort pour ne pas réveiller le reste de la troupe, deux formes sombres se détachent, eh oui, ce sont bien eux.

Le réveil, suivi du lever de Mademoiselle n’aura lieu qu’une demie heure plus tard.

Les préparatifs repousseront le départ jusqu’à neuf heures moins le quart, et c’est en promettant de leur envoyer une carte, et de repasser les voir, que nous quittons "nos bourreaux".

Au sortir de la ferme, nous rencontrons trois chevaux, avec leurs cavaliers, qui semblent très étonnés de nous voir, et s’affolent un peu.

Le temps passe vite, les kilomètres un peu moins, notre petite émotion de la journée aura la forme d’un train, un peu avant la fin de l’étape.

On marchait tranquillement, quand OURAGAN s’arrête, lève la tête, pointe les oreilles, remue dans tous les sens ... Bref, s’inquiète fortement.

L’inquiétude étant communicative, NEOS commence à s’affoler aussi.

Et qu’était-ce ? Un train ! Corail avec wagon restaurant, le PARIS ANGOULEME, ou, pour être plus exact, le ANGOULEME PARIS.

C’est à vingt heures quinze que nous arrivons, trois kilomètres environ avant notre point de chute prévu. Là, grosse angoisse !! Les personnes à qui nous nous adressons ne peuvent pas nous recevoir, ou ne le veulent ? et nous assurent que nous ne pourrons pas nous procurer de l’avoine.

Mais heureusement nous trouverons notre Saint- Bernard, sous la forme d’un sympathique barbu, installé depuis deux jours, et lui même propriétaire d’un cheval, malheureusement resté en Normandie.

Là, nous avons le droit de coucher dans la paille. Et même qu’on avait un toit !

On était aussi bien installés que les propriétaires. Précisons peut-être que les travaux n’étaient pas terminés dans leur maison.

Bref, c’est la tête dans les selles que nous décidons de dormir. Beaucoup de trains passeront avant l’aube. Il est six heures quarante cinq quand je me lève.

Le plus dur reste à faire : c’est à dire réveiller VERONIQUE.

Voilà, c’est fait !

Nous déjeunons de nutella et de pain, nous pansons, nous sellons et nous partons.

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Sur la route, toute la sainte journée ...

La route est longue et nous ne parvenons pas à convaincre notre hôte de l’utilité d’une gaine de caoutchouc sur la sangle d’OURAGAN et du Végébom, pour soigner nos chevaux, plutôt que de la poudre d’aluminium, efficace en concours, mais nulle en randonnée : chacun ses trucs !

Nous quittons la Vienne pour rentrer dans les Deux-Sèvres (79) et empruntons depuis ce matin des chemins bien entretenus.

Nous avons visité un petit village avec des sites classés : "la lanterne des morts" et "les tombeaux mérovingiens".

Circulez, y’a rien à voir.

Nous déjeunons sur le bord d’un chemin avec des petits vieux.

Le poulet acheté dans la ville précédente nous parait délicieux. Les os seront pour les chiens des retraités, ou futurs.

Après un après midi passé sous le ciel bleu des Deux-Sèvres, nous sommes arrivés, chevaux en main, devant une ferme où une charmante jeune fille nous annonce que "Peut-être ... , je vais demander à papa !"

Le papa en question nous emmène dans un champ labouré il y a peu de temps, qui, bien que sans herbe, c’est évident, était bien clôturé.

Une fois les chevaux installés dans leur paradis terrestre, nous nous installons dans la passée, face au portail de fortune confectionné contre les bêtes fugueuses.

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Home, sweet home

Ce n’était peut être pas très prudent mais il n’y avait pas le choix : ou nous nous installions dans le chemin, ce qui malgrè tout risquait de gêner, ou nous allions sur une sorte de place un peu plus loin, trop loin des chevaux, ou bien nous plantions notre tente dans le champ, trop près des chevaux. Donc finalement, dans le cas présent, c’était le meilleur endroit.

C’est après avoir grignoté un repas léger, le reste du poulet que nous nous sommes abandonnés aux bras de Morphée.

La nuit fût fraiche et le réveil difficile.

On est le quinze août, tout est fermé et on n’a rien prévu pour manger.

Heureusement, on avait une boite de thon et un paquet de pâtes.

Notre repas de midi était donc assuré. Il ne restait plus qu’à trouver un petit coin sympa pour casser la graine.

Nous arrivons vers les quatorze heures en forêt de CHIZE.

Il fait très chaud, à tel point que le bitume de la route fond : OURAGAN y a laissé une preuve indélébile de son passage.

Etant donnée la chaleur, nous décidons de nous arrêter dans les bois. Malheureusement, nous ne trouvons pas de place de rêve et nous devons nous contenter d’une petite route ombragée. Le repas sera rapide, et peu consistant. A seize heures, nous sommes prêts à partir.

Nous reprenons alors la visite de cette magnifique forêt. Nous suivons un chemin couramment emprunté par des chevaux d’assez forte corpulence semble-t-il, vu la taille des fers.

Nous cheminons pendant trois quarts d’heure dans cette superbe forêt où les coins pique nique ne manquent pas (nous les apercevons seulement maintenant que nous nous sommes arrêtés).

Nous quittons la forêt pour retrouver la campagne.

A ce moment parviennent à nos chastes oreilles les relents d’une musique digne d’une fête foraine, ou quelque chose dans le genre.

Tout de suite, nous pensons à l’éventuelle baraque de frites où nous pourrions peut être acheter des sandwiches.

Il nous faudra une demi-heure pour atteindre le patelin d’où semble provenir la musique.

Malheureusement, ce n’est rien d’autre qu’une fête organisée au camping.

Nous ne faisons donc que passer, rencontrant en sens inverse un sympathique conducteur tractant un van, qui nous fait un grand bonjour, et tournons nos regards inquiets vers cette grande dame qui se profile au loin et qui pour l’instant ne fait entendre qu’un doux murmure : j’ai nommé l’autoroute.

NEOS ne s’en formalise pas plus qu’il ne le faudrait. OURAGAN, lui, au contraire, s’affole un peu. On décide donc de mettre pied à terre, et, c’est cheval en main que nous traversons l’autoroute, est-il besoin de préciser que nous traversons sur un pont ?

OURAGAN, de plus en plus intrigué cherche à comprendre pourquoi des voitures disparaissent d’un côté et réapparaissent de l’autre.

Une fois l’obstacle franchi, la randonnée reprend son cours.

Nous joignons USSOLIERE et constatons qu’ici la tempête a fait rage, à tel point qu’il nous faut rebrousser chemin car on ne peut franchir la rivière comme prévu, il y a trop d’arbres tombés et selon les dires d’une femme, qui possédait de très beaux paons, il nous sera impossible de passer à cheval, déjà qu’à pieds ...

Nous nous rallongeons donc un peu, ce qui n’est pas fait pour nous arranger. En plus de cela, nous ratons un embranchement ; la fin de la journée se fait sentir.

Nous nous "amusons" à franchir un jet d’eau pour arroser le mais, heureusement il tourne dans le bon sens et nous ne sommes pas trop arrosés. Mais nous devons rebrousser chemin lorsque nous nous apercevons que nous nous sommes trompés. Mais là, le jet tourne dans le mauvais sens et nous nous faisons passablement humidifier.

Enfin, nous arrivons au PETIT CERNOUX, halte prévue pour aujourd’hui.

Nous discutons près de trois quart d’heure avant d’installer les chevaux. Un problème se posait : il n’y avait pas de pré libre, les chevaux devraient coucher avec des génisses, dans un champ entouré par du fil électrique. Finalement cette solution est retenue.

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Rencontre du 3° type

NEOS associe la douleur à la vision des vaches normandes : en effet, il s’est pris une décharge dans les naseaux en voulant biser une vache et il n’a pas particulièrement apprécié. Le pré est plein d’herbe, assez grand, et bien clôturé : barbelés en plus de la clôture électrique. Il n’y a pas d’inquiétude à avoir pour les chevaux, qui boudent l’avoine au profit de l’herbe.

Nous installons notre tente à la sortie du champ et rejoignons nos hôtes qui nous ont invités à partager leur repas, ce qui était fait pour nous arranger, vu que nous ne possédions plus que du nutella.

Aucun problème pendant le dîner. La famille est sympathique, on peut discuter avec eux. Ils ont l’air de vouloir défendre la cause des agriculteurs, ce qui semble normal.

Aucun problème pendant la nuit et nous retrouvons nos chevaux en forme le lendemain matin. A huit heures trente, nous sommes prêts à partir, mais nous ne serons partis qu’à neuf heures. Cette famille est décidément très bavarde et fort sympathique.

Il faut absolument trouver de l’avoine car nous n’en avons même plus pour midi. Vers dix heures, nous réussissons à trouver huit kilos d’avoine, que, pour la première fois, nous payerons : huit francs, ce n’est pas ruineux. Le p us dur sera de caser toute cette avoine sur nos pauvres montures et ceci nous prendra un certain temps. Nous y sommes enfin parvenus et après avoir traversé une grosse départementale et une voie de chemin de fer, nous gagnons la forêt. Il pleuviote un peu depuis un certain temps mais maintenant, nous sommes à l’abri du feuillage.

Après un petit arrêt "Ramsés" (arrêt pipi, tout le monde aura compris), nous reprenons la route pour rejoindre un grillage de deux mètres de haut qui nous force à faire un détour de sept à huit kilomètres, soit deux heures de marche en plus, et, pour couronner le tout, il y a bien quatre kilomètres de nationale. La colère des cavaliers se fait ressentir d’autant plus qu’OURAGAN décide de se distinguer en plaquant son cavalier descendu pour remettre un pull dans les sacoches.

Divers chemins nous auraient permis de gagner quelques kilomètres mais décidément, on ne peut pas entrer dans cette forêt.

Avant d’attaquer la nationale, on décide de faire halte pour manger. Toutefois nous ne nous arrêterons pas longtemps, juste pour déguster une boite de raviolis.

Quand nous reprenons la route, c’est pour découvrir une nationale avec de magnifiques bas côtés. Du coup, OURAGAN ne s’affole pas au passage des camions. Mais voilà que des gouttes se font sentir et elles semblent particulièrement pénétrantes et nombreuses, contrairement à celles que nous avons depuis le début de la journée. On décide donc de sortir l’attirail pour la lutte antipluie et nous reprenons la route sous la flotte.

Enfin nous quittons notre nationale pour entrer dans la forêt, sur une petite départementale. Il faut préciser que maintenant le grillage a disparu.

Il nous faut presque une heure avant d’arriver à BESSON que nous atteignons lorsque la pluie cesse. Nous ne faisons que traverser et bientôt nous passons au dessus d’un ruisseau dont l’eau parait très claire mais d’un abord difficile.

Nous faisons boire les chevaux, à grand renfort de sacs en plastique et de gamelle : le premier présentait quelques trous, la seconde était un peu étroite pour laisser passage aux bouches assoiffées. OURAGAN se débrouille bien pour le sac, NEOS semble préférer la gamelle.

Nous repartons, direction ST. SAUVEUR d’AUNIS. Là, nous trouvons des magasins pour nos ventres, de l’eau pour les chevaux. Nous apprenons de plus l’existence d’un club hippique, qui parait assez important puisqu’il se permet d’organiser un CSO ou CSI, on ne sait pas très bien. Aucun signe d’amitié lorsque nous passons devant le club, petite déception.

Un peu plus loin, sur la route, nous rencontrons le propriétaire du club qui nous pose quelques questions : destination, provenance ... Il nous propose le gîte ; sans trop insister, mais nous sommes encore loin du point prévu et de plus, il est trop tôt. Nous reprenons donc la route et vers vingt heures trente, nous atteignons LONGEVES où nous décidons de faire halte, à deux heures de l’endroit prévu, notre détour nous a beaucoup retardés. Nous dégottons un pré accueillant, malheureusement la propriétaire présumée ne l’est pas du tout : entourée de ses chats et devant son assiette de moules, elle nous enlève tout espoir. Nous cherchons dans le village et nous tombons sur un sympathique paysan. Pour lui, pas de problème, un pré est libre, avec clôture électrique.

C’est toujours mieux que rien et on s’installe.

Quand je décide de faire le tour du pré avec OURAGAN, pour lui montrer les limites de sa chambre, salle à manger et W.C., NEOS le suit, mais trompé par l’obscurité qui commence à tomber, il ne voit pas le fil, se reçoit la première décharge qui l’affole : il prend le trot pour foncer à nouveau dans la barrière, qui plie mais ne brise pas. Je tente de le calmer mais excité par les décharges électriques qu’il s’est pris, il refuse de se laisser approcher et fonce une nouvelle fois dans la clôture qui cette fois, cède. La route est libre jusqu’à la prochaine clôture, qui résistera bravement, avant de lâcher, sous les assauts d’un imbécile nommé NEOS. Là dessus, les chevaux (eh oui, OURAGAN a suivi son cher compagnon sans toutefois se prendre une seule décharge) rejoignent le village qu’ils traversent au grand trot, alertant tous les habitants, qui n’hésitent pas à nous venir en aide.

Après de courtes recherches, motorisées, heureusement, nous les retrouvons à la sortie du village, paissant tranquillement. La nuit s’annonçait bonne ! S’ensuit le retour au bercail et la décision de les enfermer dans une stabulation libre : ils devront se contenter de foin plutôt que d’herbe, qui, il faut le dire, se faisait rare dans le pré. Du coup, nous devrons dormir dans le poulailler désaffecté. Nous dînons à la lueur d’une lampe à pétrole

La nuit se passe sans problème, le lendemain de bonne heure, je vais retaper la clôture qui n’a pas trop souffert.

Nous soignons les chevaux, remballons, sellons et remercions notre hâte en nous excusant pour les dégâts. Là encore, nous ne laisserons pas d’argent.

Aujourd’hui est le jour J : nous devons nous baigner vers midi, dans la grande bleue. Mais avant, il nous faut encore parcourir quinze kilomètres. Les quatre premiers se font par des petits chemins, nous pouvons donc déjeuner : en effet, depuis deux ou trois jours, nous avons décidé d’un commun accord de prendre notre petit déjeuner en selle, ce qui nous permet de gagner du temps le matin, de manger moins vite, mais aussi d’exercer notre adresse, car prendre du nutella dans un pot, le porter à la bouche, n’est pas évident quand on pense qu’une main est réquisitionnée d’office pour la direction et que c’est seulement avec l’autre main que l’on doit veiller au pot de nutella, se servir sans en mettre partout. Bref, en conclusion, un cheval, ça bouge beaucoup en marchant, mais c’est jouable.

Le petit déjeuner expédié, nous approchons d’un village où, oh joie, oh miracle ! nous dégottons des pains au chocolat.

Après avoir traversé une voie ferrée qui longe un canal, nouvel arrêt "Ramsés".

Et on reprend la route, pour s’apercevoir que j’ai fait une erreur en établissant le parcours, mais cela ne nous allonge pas beaucoup, un kilomètre au plus. Vers onze heures, nous arrivons à NANTILLY et découvrons un coin d’eau potable, en face de la mairie. Mais gros problème, c’est juste un robinet, sans bassine. OURAGAN excelle dans l’art de boire au robinet, mais manifestement, NEOS n’est pas très doué.

Après avoir fait quelques emplettes, départ pour la mer que nous commençons à sentir et à entendre. Cette dernière butte et à nous la grande bleue ! Mais déception, c’est une plage de galets qui précède une mer particulièrement sale. Les chevaux hésitent un peu pour s’approcher et se décident enfin. D’un commun accord, ils se mettent à boire cette eau peu claire, qui, sans aucun doute, a très mauvais goût, vue la réaction des assoiffés : OURAGAN recrache tout ce qu’il a ingurgité avec une moue de dégoût digne d’être prise en photo ; quant à NEOS, il montre les dents d’un air désapprobateur. Nous quittons les galets pour rejoindre la petite route du bord de mer et atteindre la pointe ST. CLEMENT.

Nous découvrons alors une grande plage vaseuse. Décidément, il ne sera pas question de galoper sur le sable fin, ni même de se baigner. Nous trouvons un petit coin tranquille pour faire halte. Au menu : spaghetti bolognaise, riz au caramel (Yabon !). Il fait soleil, nous en profitons pour faire sécher le double toit qui fait office de tente, les chaussettes et les bottes.

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Les manouches

Nous recevons la visite du propriétaire de la petite cabane à côté de laquelle nous nous sommes installés ; c’est un sympathique ostréiculteur.

Après cette halte ensoleillée, nous repartons et nous dirigeons vers ESNANDES. Malheureusement, nous ne pouvons suivre la côte car c’est bien trop marécageux, aux dires de l’ostréiculteur. Nous suivrons donc la route sur cinq kilomètres (une heure !), route assez fréquentée. Enfin, nous arrivons à CHARRON. Nous pourrons y acheter du pain, des nectarines, mais pas de viande : il fait trop chaud et elle ne pourrait pas résister jusqu’à l’arrivée.

Lorsque nous quittons cette ville, nous réalisons qu’il se fait tard et que la route est encore longue. Nous jouons le tout pour le tout et décidons de nous diriger vers un chemin qui, s’il est praticable, nous permettrait de gagner du temps, mais, par contre, si on ne peut pas passer, il nous ferait perdre une heure.

La difficulté s’avère être des écluses : en effet, il n’est pas évident que nous puissions passer.

Arrivés aux écluses du BRAULT, qui ne nous posent aucun problème, nous nous renseignons à propos des écluses des ENFRENAUX. Pas de problème nous dit-on. Nous empruntons donc ce merveilleux chemin qui longe le canal qui va de MARANS à la mer et qui s’étend sur cinq kilomètres que nous franchirons rapidement, à grands renforts de marche à pieds à un rythme assez rapide et de temps de galop pas trop prolongés mais suffisants pour nous avancer.Enfin, l’écluse est en vue, de même que de magnifiques voiliers de neuf mètres et des bananes de long. Comme prévu, pas de problème à l’écluse. Comme il est trop tard pour passer à MARANS, nous décidons de couper au plus court mais pour cela il nous faut franchir une passerelles de quatre vingt centimètres de large environ et pleine de vide autour avec un garde fou d’un côté seulement. Les chevaux ne s’affolent pas et passent correctement malgré le bruit infernal qu’ils font avec leurs fers sur la passerelle de fer. Nous traversons une ferme et rejoignons une route bordée par un champ dans lequel s’égayent une vingtaine de chevaux, dont un bel étalon qui, seul, s’occupe de nous. Nous traversons le canal de VIX et voyons se dessiner dans le lointain l’ILLE d’ELLE, les trois kilomètres seront franchis au galop, au trot, au pas et à vingt heures trente, peut-être vingt et une heure, nous atteignons l’ILLE d’ELLE, que nous traversons. Cette traversée est interminable, cette ville s’étend en longueur. Enfin, voilà la sortie et nous nous dirigeons vers notre point de chute.

Une demie heure plus tard, nous arrivons au but. Il semble que les chevaux vont devoir passer la nuit attachés car il n’y a pas de pré libre. On décide donc d’attacher les chevaux dans une grange, de chaque côté d’une remorque sur laquelle est disposé du foin. Les deux chevaux se font face et peuvent se toucher du nez mais pas des fesses.

Après leur avoir donné leur avoine, nous allons dîner chez nos hôtes. Nous n’avons pas pu refuser, d’autant plus que nous n’avions rien à manger, étant arrivés trop tard à MARANS. Ce repas était le bienvenu, de même que la douche qu’il nous est permis de prendre, après le repas. Il est presque minuit lorsque nous rejoignons la grange, où nous avions insisté pour dormir. Tout semble calme, OURAGAN est couché et ne se relève même pas à notre arrivée. NEOS, quant à lui, parait un peu nerveux mais aucun problème, que l’attache pourrait créer, ne semble se poser.

Nous nous apprêtons donc à dormir, installés dans nos duvets et juchés dans la paille, au dessus des chevaux, ce qui nous permet de dominer la couche de nos montures.

Le sommeil est dur à trouver, d’autant plus que NEOS fait beaucoup de bruit car il est attaché au plateau par une chaîne : en effet, c’était trop risqué de l’attacher avec sa corde, ayant l’affreuse manie de la manger, elle est en piteux état.

Nous commençons à nous endormir quand NEOS nous réveille avec le bruit qu’il fait. D’après le peu que nous pouvons voir, il semblerait qu’il ait essayé de monter sur la remorque. VERONIQUE s’occupe de son cas et elle ne pourra pas beaucoup dormir. Je déclare forfait : ça fait quatre nuits que je ne dors que d’un oeil pour surveiller les bestiaux, cette nuit, j’ai décidé de dormir. Mais NEOS ne l’entend pas ainsi. Nous sommes réveillés en sursaut croyant que la fin du monde est proche. En vérité, ce n’est que NEOS qui a réussi à rejoindre OURAGAN, en passant de l’autre côté de la remorque. Mais maintenant, il gît par terre, la tête maintenue par la chaîne sur le plateau. Je me précipite, le détache, et retire OURAGAN. Je surveille la tête de NEOS qui risque de taper dans le plateau lorsqu’il décidera de se relever. Enfin, il rassemble ses quatre membres et se met debout. Ca va, pas trop de bobos, seulement quelques égratignures, mais il faudra attendre le jour pour aviser. Nous rejoignons notre lit en priant pour qu’ils n’aient pas l’idée de se botter, bref, pour qu’ils restent tranquilles, il est alors trois heures du matin. Lorsque je me lève le lendemain matin, VERONIQUE est déjà debout, c’est bien la première fois !. Les chevaux sont calmes, attentifs à manger l’herbe fraîche que Monsieur GANDRIAU, notre hôte, leur a apporté. Après examen de Sieur NEOS, il semble que ce ne soit pas trop grave : juste quelques égratignures peu profondes (un peu de peau enlevée) mais surtout un membre enflé qui a l’air douloureux. Nous irons le baigner dans le canal, cet après midi.

En attendant, nous leur dégottons un champ, petit, mais plein d’herbe et relativement bien clôturé. Nous mettons la corde pour plus de sûreté, d’un côté. AH ! si nous avions mis les chevaux dans ce pré hier !! … Le midi, nous devons déjeuner avec toute la famille, repas bruyant et bien arrosé, n’est-ce pas, VERO, toi dont la tête tourne … Après avoir fait la vaisselle, nous regagnons notre lit de paille. Nous décidons de faire la sieste qui bientôt dégénère en bataille rangée.

Après ce défoulement, qui a permis à VERO d’éliminer les verres de guignolet, de pinaut et de vin blanc qu’elle a ingurgités à midi, nous sellons les chevaux et nous apprêtons à aller baigner NEOS, qui ne présente aucune anomalie dans sa démarche. Nous arrivons à l’endroit indiqué et baignons les chevaux. La piscine se présente comme une dalle en béton qui descend en une pente plus ou moins douce vers le canal. Mais au bout de cette dalle, il y a une grande marche qu’OURAGAN franchi aisément et il doit alors amorcer quelques longueurs de crawl pour regagner la terre ferme, complètement trempé ainsi que son cavalier qui a fait le plein d’eau potable dans ses bottes et qui en a profité pour laver son jean, qui n’en avait pas besoin. La promenade terminée, nous quittons cette ville pour rejoindre l’ILLE d’ELLE par un petit chemin peu fréquenté. J’en profite pour enlever mes bottes, les vider, enlever mes chaussettes et les pendre à la longe pour les faire sécher. C’est ainsi que je franchirai la distance entre le gué de VELLUIRE et l’ILLE d’ELLE. Cinq cents mètres avant d’entrer dans la ville, je réintègre mes chaussettes, qui, relativement sèches, regagnent les bottes, relativement humides.

Arrivés en ville, nous nous ferons guider par deux gosses qui nous emmènent à la cabine téléphonique, à la pharmacie et au bistrot.

C’est en regagnant notre point de chute que nous nous apercevrons que NEOS boite ! Là, ça devient sérieux. Nous n’oublions pas d’acheter notre manger du lendemain à un épicier ambulant. De retour dans notre champ, NEOS boite toujours. Nous appliquons un traitement de fortune : compresse d’eau vinaigrée renouvelée toutes les deux heures. Grosse inquiétude et remise en cause du départ prévu le lendemain. Pourtant si nous ne partons pas demain, nous perdons une journée, ce que l’on ne peut se permettre.

Nous nous couchons après avoir décidé de nous préparer à partir, c’est à dire de nous lever de bonne heure, si la jambe est encore enflée, nous aviserons. La nuit est relativement calme. Je me lève une fois car j’ai cru entendre des chevaux marcher sur la route, mais le vent dans les tôles du hangar m’aura trompé. Le lendemain, à six heures quinze, c’est un ciel gris et sombre qui nous accueille, de même qu’un fort vent d’ouest.

Horreur, NEOS a encore le canon enflé mais il ne boite plus, les compresses y sont certainement pour quelque chose. Il n’est cependant pas question de partir, car avant la fin de la journée, il boiterait de nouveau : deux jours de repos au moins sont nécessaires.

Nous décidons donc ne nous faire rapatrier en camion, puisqu’un retour à cheval ne peut se faire avant quelques jours.

En attendant que tout le monde se réveille, nous regagnons nos duvets et nous permettons un petit somme.

Nous avons de la chance, nous sommes dans une région de propriétaires de chevaux et nous avons deux adresses où nous rendre.

C’est donc en vélo et accompagnés de la petite fille de Monsieur GANDRIAU, PATRICIA, que nous nous rendons chez Madame FORESTIER.

Celle-ci se montre très coopératrice : pour le camion, il faut qu’elle demande à son mari, absent pour le moment. Elle se rensigne sur l’état du cheval et nous communique le numéro de téléphone d’un vétérinaire calé sur les chevaux. Elle passera en fin de matinée nous dire ce qu’il en est.

Nous passerons la matinée à flaner, à changer les compresses de NEOS et à faire du poney, ou plutôt de la carriole, tirée par la "ponette" de Monsieur GANDRIAU.

Vers onze heures trente, Madame FORESTIER nous rend visite, accompagnée d’un magnifique trotteur, complètement fou parait-il : lors d’un concours, il a sauté tous les obstacles, la corde, la barrière et ne s’est arrêté que lorsqu’il s’est aperçu qu’il était tout seul au milieu d’un champ, la cavalier cramponné à son encolure.

Le départ est prévu pour cet après midi.

Je selle OURAGAN et raccompagne notre bienfaitrice jusque chez elle, ce qui me permet de fatiguer un peu OURAGAN qui n’aura pas besoin de "péter" la forme cet après midi : en effet, c’est la seconde fois qu’il monte en camion, la première fois remonte à six ans plus tôt, quand on l’a amené de son pré natal jusque chez moi.

NEOS, quant à lui, est un vieil habitué.

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La vie est dure ...

Nous déjeunons seuls, puisque la famille GANDRIAU est partie déjeuner en ville.

Enfin, vers quinze heures, le camion arrive ; c’est un Citroën tout bête, tout gris.

Après avoir chargé toutes nos affaires dans une caisse, on se retourne vers les chevaux.

NEOS, monte sans problème, malgré la marche due à l’absence de plan incliné. Par contre, pour OURAGAN, ce n’est pas pareil, mais il finit par monter sans se blesser. Le premier virage le surprendra, et les suivants aussi.

Nous reprenons donc le chemin de ST. SAVIN. Le voyage sera long et pénible : rester assis pendant plus de quatre heures entre deux chevaux qui n’arrêtent pas de jouer aux imbéciles et de glisser, c’est exténuant.

La route se fera presque entièrement sous la pluie ce qui n’est pas très intéressant, vu que le camion a quelques fuites, et que je me trouve justement dessous ! (les fuites, pas le camion !).

Enfin, on aperçoit le clocher de ST. SAVIN, le calvaire touche à sa fin, heureusement car NEOS commence à s’impatienter.

Les derniers virages pour atteindre PREMILLY ne seront pas mal dans leur genre, et la tête de la famille de VERONIQUE non plus, d’autant plus qu’ils n’étaient pas prévenus.

OURAGAN descendra sans problème, NEOS se cognera, grand impatient va !

Ils passeront cette nuit ensembles car je ne veux pas ramener OURAGAN tout de suite, après quatre heures de camion ...

Nos sacoches et tout le matériel déchargés, Madame FORESTIER prend congé de nous, qui nous en tirons pour seulement deux cents francs.

Le soir, nous regagnons nos lits, abandonnés depuis une semaine, et nous nous endormons, chacun de notre côté, mais rassurés.

Le lendemain, je récupère OURAGAN, on pourra monter NEOS deux jours plus tard.

Nous aurons tout de même parcouru plus de deux cent cinquante kilomètres en six jours, traversé quatre départements et rencontré des gens formidables.

Même si NEOS n’était pas parfait, on a quand même eu de bons moments. Il est regrettable que nous n’ayons pas pu visiter les marais : même si nous ne pouvions pas passer dans la VENISE VERTE, ces marais que nous devions traverser devaient être très beaux. Peut être les visiterons nous une autre fois.

En attendant, la randonnée est finie, nous rangeons notre matériel : sacoches, tente, duvets, réchaud, gamelles ... et sûrement le ressortirons nous l’année prochaine pour découvrir d’autres chemins.

De cette randonnée, nous tirerons de nombreuses leçons : rester toujours attentifs, ne pas oublier les règles élémentaires du randonneur à cheval. Toujours faire voir au cheval les limites du pré dans lequel il va passer la nuit, veiller à ce qu’aucun pli ne se fasse avec les couvertures, qui pourrait blesser les chevaux, apprendre à connaître sa monture et à satisfaire ses désirs, savoir accorder du temps aux personnes que l’on rencontre pour discuter, répondre à leurs questions, laisser derrière soi une bonne opinion des cavaliers, afin que d’autres soient aussi bien accueillis.


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